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Olivier Faure reconduit à la tête du PS ? Le fantôme qui succède à des spectres…

Olivier Faure reconduit à la tête du PS ? Le fantôme qui succède à des spectres…

Du 13 au 15 juin prochain, le Parti socialiste désignera son prochain premier secrétaire. Olivier Faure, l’actuel tenant du titre, remettra sa couronne en jeu. Autant dire que la planète entière retient son souffle devant l’importance de l’enjeu.

Tout d’abord, dressons l’état des forces en présence. Contre le candidat sortant, s’annoncent trois challengers : Hélène Geoffroy, maire de Vaulx-en-Velin (Rhône) et Nicolas Meyer-Rossignol, maire de Rouen (Seine-Maritime), duo récemment rejoint par Philippe Brun, député de l’Eure. Le dernier outsider n’est autre que Boris Vallaud, monsieur Najat Vallaud-Belkacem à la ville, dont l’ambition suprême consiste à « rassembler les fauristes et les antifauristes. » Un poids coq contre quatre poids plume ; l’affiche s’annonce donc alléchante.

Olivier Faure, quant à lui, affiche un projet au moins aussi fracassant : « Il faut aller jusqu’au bout de ce que nous avons entrepris et permettre de retrouver la gauche. » « Retrouver la gauche » ? Elle serait donc perdue ? Voilà ce qui arrive, quand on n’est pas soigneux avec ses affaires. Longtemps, ce dernier a tenté de faire l’unanimité au sein de son propre parti. C’est désormais chose faite, même si l’unanimité se fait contre lui. Un constat affiné par le politologue Rémi Lefebvre, cité par France Info : « Le leadership d’Olivier Faure est fragile, il a pris le parti avec à peine 50 % des voix. » Et le même d’ajouter : « Le Parti socialiste est un mouvement moins actif que La France insoumise, avec des élus locaux qui s’impliquent peu dans la vie nationale. » Bien vu Ray Charles , sachant que le PS pourrait bien un jour compter plus d’élus que de d’électeurs, à l’instar d’une autre formation ayant jadis régné sur la vie politique française : ce CNI, désormais maintenu en survie artificielle par ce qui demeure de lambeaux du RPR d’antan. De fait, une telle situation amène plusieurs interrogations.

De François Mitterrand à Olivier Faure…

La première, c’est de comprendre comment le parti fondé par François Mitterrand en 1971, lors du congrès d’Épinay, a-t-il pu descendre aussi bas ? Certes, les mouvements politiques naissent, grandissent, vieillissent et meurent, au même titre que toutes les entreprises humaines. Pourtant, le Front national, créé un an après le PS, en 1972, est toujours là, dans une forme que nombre de ses concurrents pourraient aujourd’hui lui envier. La raison d’une telle longévité n’est pas à chercher bien loin : malgré des changements de ligne conjoncturelles, sur l’économie et la géopolitique principalement, le mouvement lepéniste n’a jamais trop dévié de sa raison d’être, celle consistant à donner une voix à ceux qui n’en avaient pas ; soit le principe même du populisme.

En revanche, et ce menu détail est trop souvent oublié, avant le Parti socialiste, il y eut la SFIO, Section française de l’Internationale ouvrière. La dénomination parle d’elle-même, le vocable « d’ouvrier » ayant depuis belle lurette disparu de la vulgate socialiste, au grand dam de Pierre Mauroy en son temps. La suite est connue, le PS n’ayant pas mis longtemps à bazarder le social pour le sociétal, la défense des cols bleus pour celle des crop tops arc-en-ciel, la priorité donnée aux déshérités pour celle des héritiers. Résultat ? Les classes populaires ont demandé l’asile politique chez Le Pen, tandis que le reste du troupeau, fonctionnaires, immigrés, traders et drag-queens, n’en finissent plus de zapper entre Emmanuel Macron, Raphaël Glucksmann et Jean-Luc Mélenchon. À ce titre, le résultat électoral d’Anne Hidalgo, lors de l’élection présidentielle de 2022, est sans appel : 1,75 %. Soit à peine plus de deux fois le score de Philippe Poutou (0,77 %) et quatre fois moins que celui d’Éric Zemmour (7,07 %). Mais avec 4,78 % des suffrages, Valérie Pécresse, candidate de cette droite jadis donnée pour être « de gouvernement », il n’y a pas de quoi non plus danser la salsa.

Olivier Faure ? Le charisme d’une huître…

Si la première raison de cette dégringolade peut aisément s’expliquer d’un point de vue rationnel ; la seconde, plus irrationnelle, relève du simple charisme. Car là, l’émotion est reine : le charisme, on l’a ou on ne l’a pas. Si François Mitterrand, Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen, chacun dans leur registre, en avaient à revendre ; Olivier Faure, lui, serait plutôt du genre acheteur. C’est injuste, mais c’est ainsi. Et ce qui peut faire la différence entre un Johnny Hallyday et un Dick Rivers vaut aussi pour la sphère politique : le petit Olivier ne sera jamais le grand François, « tonton » de son petit nom, comme on disait autrefois « Jacquot » ou « Jean-Marie ».

La preuve par la notoriété : qui connaît Olivier Faure ? Pas grand monde. Même Manuel Valls est plus connu et on doit même le reconnaître dans la rue. Logique, il a la belle gueule qu’il faut, la faconde allant avec, et même les entrées dans le showbiz, telle qu’en témoigna son mariage tapageur avec Anne Gravoin, la violoniste des stars, dont le Johnny plus haut évoqué. Mais Olivier Faure, hormis un père d’Action française et des prises de position en faveur des Ouïghours, minorité musulmane persécutée par Pékin, cause mondaine par excellence, RAS, comme aurait dit le défunt et regretté Yves Boisset.

Rachid Temal, le PS aussi…

Le pire, ce sont encore ses prédécesseurs. En effet, qui se souvient d’Harlem Désir, premier secrétaire de 2012 à 2014, ou de Jean-François Cambadélis (2014-2017), le trotskiste lambertiste qui n’a pas réussi, contrairement à sa Méluche de camarade ? Personne ou pas grand-monde. Puis, la cerise sur le pompon : Rachid Temal. Pour s’en convaincre, pas besoin de savants sondages, une discussion de zinc suffit. Posez la question à deux euros cinquante : « Qui est… Rachid Temal » ? Si quelqu’un répond, il n’est pas interdit de lui remettre sa tournée. Et pourtant, cet illustre inconnu fut premier secrétaire intérimaire du parti fondé par François Mitterrand, de 2017 à 2018 !

Rachid Témal ? C’est plutôt le Parti socialiste qui ne va pas très bien.

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