Où va Donald Trump ? Le bourgeois gentilhomme de Washington nous a habitué à le voir construire, détruire, reconstruire, et détruire encore ses châteaux de sable au point qu’on ne sait si lui-même sait où il va. Il en résulte que sa grande coalition de 2024 s’effondre dans les sondages. Après avoir lâché bien vite l’envahissant Musk dans son combat du DOGE contre le gaspillage budgétaire et les détournements de l’argent public (ce qui a donné un répit au parti de la guerre allié à celui du wokisme), il a ensuite opéré un double demi-tour sur triple grand écart dans le dossier Epstein. Puis il somnole dans les enquêtes sur les tireurs isolés qui assassinent ou tentent d’assassiner ceux qui gênent. Sans oublier les couleuvres que ses « alliés » du Congrès lui font avaler sur le Proche-Orient, tout comme ses « alliés » européens le sabotent constamment sur la question de la Mittel Europa. Il tolère encore les humiliations des juges. Et une ombre d’affairisme et d’enrichissement personnel (monnaies numériques) plane sur son clan. Sa base électorale semble le lâcher : les jeunes depuis la mort de Charlie Kirk, les libertariens depuis la mort du DOGE, les isolationnistes depuis ses louvoiements en Ukraine et au Proche-Orient, les cols bleus et les agriculteurs depuis sa gestion brouillonne d’une pourtant brillante politique de tarifs douaniers bien mal vendue, le mouvement America First depuis que le Premier Ministre Benjamin Netanyahou présente Israël sous un phare de puissance autonome, disposant de sa propre stratégie géopolitique et n’ayant à rendre de comptes à personne, tout en exigeant de ses amis américains davantage de vigilance médiatique ou numérique afin de contrer un sentiment anti-Israël croissant, en particulier chez les plus jeunes.. Autant de pressions qui forcent Trump à dire tout et son contraire, comme à se ridiculiser lorsqu’il veut se convaincre qu’il est l’organisateur de ce qu’il ne contrôle pas.
Alors ceux qui le soutiennent encore lancent l’alarme: à ce jeu-là Trump va perdre les législatives de novembre 2026. S’il les perd, c’en sera la fin du trumpisme d’America First. Et la persécution judiciaire reprendra contre lui.
Contre-feu médiatique
D’où le récent contre-feu médiatique du plan de sécurité nationale, qui doit probablement beaucoup à la plume de Steve Miller et de JD Vance, voire de la Heritage Foundation. Ce document nous démontre que certains, dans l’entourage de Trump, comprennent les comportements-types du monde réel. Ainsi de la Chine, de la Russie, des pays du Golfe ou du Bharat (tous champions de la patience stratégique), ou encore de la Turquie comme du Pakistan (experts en cabotage), puis enfin de ce qui se nomme l’Union Européenne (fétichisme kiéviste). Les conseillers de Trump qui viennent de s’exprimer en son nom comprennent donc les tempéraments profonds des acteurs géostratégiques des nations. L’on y trouve ainsi, Chateaubriand oblige, ceux qui veulent mais ne peuvent pas encore (Modi, Mohamed Ben Salman, ainsi que les leaders de l’Afrique et des pays émergeants), puis celui qui peut mais ne le sait pas tout à fait (Trump). Il y a bien entendu ceux qui peuvent et qui veulent, (Xi Jinping et Poutine). Sans oublier ceux qui aimeraient bien revenir en arrière en faisant perdre à Trump ses prochaines législatives. L’on y trouve les trois grands timoniers des caravelles allemande, britannique et française. Ayant perdu le mode d’emploi de leurs ancêtres, ils se voudraient encore un destin mais ne peuvent que s’en remettre à l’élixir du venenum in cauda.
Or la géopolitique change, volens nolens, de même que changent les oligarchies qui la dirigent. Ces dernières se parlent et réorganisent déjà le monde sur le dos des terres promises, que celles-ci se nomment Amérique messianique, Ukraine apocalyptique ou Israël rédempteur. Les giga-oligarchies, celles des fusées, des monnaies numériques, des terres rares comme des terroirs ou de l’hydraulique, changent aujourd’hui de fusil d’épaule. Fatiguées des échecs languissants de leurs messianiques albatros, elles ont déjà en tête de constituer de nouvelles filiales, chacune assise sur une doctrine de Monroe qui lui soit propre : quelques puissances-continents suffiront pour couvrir le monde. Un monde imparfait mais lucide, où tout se réglera en fonction des rapports de force et non du fait de telle ou telle insupportable doxa. Un monde à la fois traditionnel et futuriste où le capitalisme technologique mondial, nouvelle main invisible, n’aura plus à se perdre en vains arbitrages entre le messianisme des uns et celui des autres. L’apparente guerre civile larvée entre « America First » (l’Amérique « du pôle Nord au pôle Sud ») et « Israël First » (les chrétiens sionistes et les néoconservateurs) laissent présager aujourd’hui que la notion même de terre promise est en train de perdre son sens. Quant à l’Europe de la Hierarkhia, lui faudra-t-il un nouveau Clovis pour renaître de ses cendres? Un nouveau Constantin? Ou un nouvel Attila?



