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présidentielle 2022

Tous président ! J moins 365

La rédaction d’Éléments va suivre d’au plus près, une année durant, la présidentielle de 2022. Des carnets de campagne au long cours pour mettre à nu les discours, les programmes, les hommes et les clivages. Le compte à rebours commence ici…

Nous ne connaissons pas encore la date de la prochaine élection présidentielle française1. On sait cependant qu’elle sera immanquablement un grand moment démocratique. Comme tous les cinq ans, depuis la réforme du quinquennat, cette élection déchaînera les passions et suscitera un intérêt sans égal chez les électeurs. Tout le monde, des classes moyennes aux bourgeois, en passant par les catégories populaires, y participera massivement, à tout le moins au premier tour.

Qu’importent les mensonges, les promesses non tenues et les palinodies des candidats une fois élus à la magistrature suprême… Le peuple français veut toujours y croire et continue à voter lors de ce scrutin. Cet engouement ne doit rien au hasard.

La mère de toutes les batailles

L’élection au suffrage universel direct, voulue par le général de Gaulle en 1962, permet la rencontre entre un homme et un peuple. Elle confère au régime républicain l’incarnation qui lui manquait jusqu’ici. La personnalisation du pouvoir, cette capacité d’identification de chacun de nous en celui qui va représenter la Nation a contribué à maintenir l’intérêt des Français pour ce moment cathartique de la vie politique.

Clé de voûte des institutions, selon le mot de Michel Debré, le président concentre également des pouvoirs sans commune mesure avec les autres chefs d’État des pays occidentaux. Certes, la fonction, de même que l’État, a perdu de sa superbe depuis les années de Gaulle, et ses prérogatives n’ont eu de cesse de se réduire. Les multiples révisions de la Constitution, la décentralisation, l’autorité croissante des juges et les délégations de souveraineté (monnaie, frontières…) à l’Union européenne, ont en partie eu raison de cette exception française. Néanmoins, le président demeure un personnage hors du commun, de par l’onction démocratique qu’il reçoit lors de son élection.

Tel le Gulliver de Swift, entravé par les Lilliputiens, il conserve une force latente, un pouvoir symbolique et institutionnel incomparable. S’il n’est plus thaumaturge, porté par une volonté populaire, il a encore, lui seul, les moyens d’agir et de changer la donne politique, économique et sociale du pays. Les Français l’ont bien compris.

L’élection présidentielle est donc la mère de toutes les batailles, celle qui conditionne la vie politique du pays pour les cinq prochaines années.

Nouveaux clivages ou vieilles ficelles

La fonction présidentielle n’est pas la seule à avoir connu d’importants bouleversements ces dernières années. Le champ politique a également évolué considérablement. L’élection présidentielle, jusqu’au début des années 2000, était le lieu de l’affrontement entre des candidats de gauche et de droite, appuyés par des partis historiques, solides et relativement cohérents sur le plan des idées.

Les partis traditionnels, qui ont démontré leur incapacité à répondre aux aspirations des Français, sont désormais moribonds. Ils se révèlent par ailleurs les victimes collatérales d’un individualisme qui a contaminé l’ensemble des citoyens, d’un repli généralisé sur la sphère privée et d’un désintérêt massif pour la chose publique. Cette dépolitisation, annoncée il y a longtemps par Tocqueville, a permis l’émergence de structures nébuleuses reposant uniquement sur la personnalité de leur chef, peuplées non pas de militants, mais d’arrivistes et de fanatiques.

Les prétendants à la présidence de la République ne manqueront pas l’année prochaine. Nombreux sont ceux qui ont déjà, à travers leur mouvement, écurie ou autre coterie, déclaré leur candidature. Il faut dire que le nivellement par le bas, celui qui affecte l’école, la culture et notre société tout entière, n’a pas épargné le politique. L’impéritie du personnel, et même, horresco referens, de récents présidents, dont un « normal », pousse nos grenouilles en tout genre à s’imaginer en bœufs. C’est le syndrome du « Pourquoi pas moi ». Troué, rapiécé, le costume restera trop grand pour ces politicards, et les Français, qui gardent une haute idée d’eux-mêmes, exècrent les médiocres ; ils finissent renvoyés ou haïs.

Une chose demeure certaine, l’élection de l’année prochaine constituera un tournant pour la France. Qui endossera le costume présidentiel ? La gauche libérale-libertaire rempilera-t-elle pour cinq ans à l’Élysée, confortant l’orientation prise par le pays depuis bientôt dix ans ? L’alternative populiste l’emportera-t-elle, et avec elle, verrons-nous l’émergence d’une politique inédite ? La gauche de Tonton et la droite molle chiraquienne ont-elles dit leur dernier mot ?

Carnets de campagne et lignes de fracture

À travers des carnets de campagne, nous vous proposerons de suivre, à droite comme à gauche, les candidats, les enjeux de cette élection, d’en décrypter les principaux thèmes, mais aussi de prendre un peu de recul. Éléments n’a pas l’ambition de commenter l’écume des jours, le clapotis de politiques devenus des communicants, mais de réinscrire l’actualité, notre présent, dans une perspective plus longue, d’apporter des clés de compréhension dans une société en pleine anomie.

À celui, inquiet, en partie résigné, qui ouvre aujourd’hui un journal, regarde la télévision ou perd son calme en écoutant la radio publique, disons-le tout de go : c’est mal parti. Le risque est grand d’en être exactement au même stade dans un an, de voir ce lent délitement perdurer et d’assister au deuxième acte d’un mauvais Feydeau.

Reste que nous avons un rôle à jouer et qu’il faut profiter du plus petit morceau de la scène, celui qui nous est laissé, pour exprimer une voix dissidente, réfléchir et préparer l’avenir.

Et rappelons avec Claudel que « le pire n’est pas toujours sûr… »

1. Conformément la Constitution, le premier tour de l’élection présidentielle doit avoir lieu entre 20 et 35 jours avant la fin du mandat du président sortant. Emmanuel Macron ayant pris ses fonctions le 14 mai 2017, la passation de pouvoirs éventuelle devrait avoir lieu le 13 mai 2022 au plus tard. Le premier tour de l’élection présidentielle se tiendra donc entre le 8 et le 23 avril 2022, le second tour ayant lieu deux semaines après le premier.

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