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Soral en prison, la Suisse a-t-elle perdu la raison ?

Soral en prison, la Suisse a-t-elle perdu la raison ?

Pour une muflerie proférée au cours d'une vidéo youtube, le polémiste Alain Soral a été condamné à deux mois de prison ferme par la justice suisse. La défense de la liberté d'expression n'étant ni négociable ni à géométrie variable, David l'Epée, lui-même régulièrement la cible des sourcilleux « flics de la pensée », s'inquiète des dérives liberticides de son pays, longtemps réputé pour son libéralisme et son sens de la mesure.

« Faire face aux flics de la pensée » : tel était le titre de la table ronde que j’animais samedi à Paris. En rentrant chez moi le lendemain je découvre que la Suisse n’a rien à envier à la France en matière de répression de la liberté d’expression…

Le colloque des 50 ans de la revue Éléments que je vous annonçais il y a quelques jours a été une réussite. La salle était comble, les interventions se sont succédé sans discontinuer de 14h00 à presque 20h00 et la journée s’est terminée par un apéritif dînatoire qui a réuni de nombreux lecteurs et soutiens de la revue et nous a permis, à mes collègues et à moi-même, de passer un moment agréable avec quelques-uns de ces femmes et de ces hommes aussi fidèles que discrets qui nous lisent parfois depuis des décennies et nous permettent d’écrire et d’exister. Merci à vous tous !

Comme vous le saviez j’animais une table ronde intitulée De la pensée unique au wokisme : faire face aux flics de la pensée, où j’ai donné la parole à l’écrivain Jean-Paul Brighelli et au député Roger Chudeau, qui a fondé récemment une Association des parlementaires contre le wokisme afin d’opposer au lobbying des partis du système sur la question une résistance au sein même des assemblées. La vidéo sera bientôt en ligne, je la partagerai ici. La présence à cette table ronde d’un élu RN n’a pas manqué de faire tiquer les trois Pieds Nickelés de Libération (ceux avec lesquels je suis en procès, vous l’avez compris) qui ont écrit ceci mardi dans leur newsletter :

Nos plumitifs ironisent sur le qualificatif de « terrorisme intellectuel » tout en se vantant eux-mêmes d’avoir réussi à faire céder le RN à leur chantage à l’antisémitisme imaginaire, poussant le parti à m’ostraciser de son colloque à la suite d’un article pour lequel, je le rappelle, nous sommes en procès. Il faut le faire !

Quelques jours auparavant, les mêmes petits flics (qui viennent de monter en grade à Libé, journal qui semble récompenser les fautes professionnelles graves par des promotions – chacun sa déontologie) commettaient un autre article, consacré au RN cette fois, où on pouvait lire ceci :

Vous connaissez la méthode de ce type d’articles : méduser le lecteur par un effet d’accumulation de noms et de mots-clés censément effrayants, en espérant que ces mots déteignent sur la réputation des personnes mentionnées dans le fil de la phrase, même si ces personnes n’ont aucun rapport avec tout ça. Avec l’antisémitisme ou l’homophobie ça marche toujours très bien, alors pourquoi s’en priver ?

Je ne vous cache pas que je me méfie par principe des politiciens (autant que des journalistes d’ailleurs) et qu’aucun parti ne trouve grâce à mes yeux, même si certains sont un peu « moins pires » que les autres. Je suis content d’avoir fait la connaissance de M. Chudeau, je lui souhaite bonne chance dans son combat et j’espère que le RN aura compris le message : nous à Éléments, quand on débat du wokisme, on ne « désinvite » pas d’éventuels interlocuteurs du parti de Jordan Bardella… Puisse, une prochaine fois, la réciproque être vraie : à bon entendeur !

De retour dans ma chère patrie je me dis que ces tendances inquisitoriales sont tout de même moins marquées ici qu’en France et qu’à tout prendre on respire un peu mieux sous nos latitudes, où il demeure – malgré le wokisme ambiant chez les élites – une certaine liberté d’expression. Erreur !

Voilà ce qu’on pouvait lire ce mardi matin sur les manchettes de la presse de l’Arc lémanique :

Vous imaginez bien que vu les procès en sorcellerie que me font les petits flics de Libération et dont attestent une nouvelle fois les coupures de presse que je viens de reproduire ci-dessus, Soral est sans doute la dernière personne dont j’ai envie de vous parler ici. Il ne vous aura en effet pas échappé qu’en dépit des amalgames grossièrement entretenus par certains de nos ennemis communs, nous ne sommes pas exactement en bons termes (c’est peu de le dire) ni n’avons les mêmes idées et que ça fait une bonne dizaine d’années que le peu de rapports que nous avons sont exécrables. Non sans raison d’ailleurs. Mais bon, qu’importent ce que peuvent croire (ou feignent de croire) les inquisiteurs, revenons au réel.

Le réel, quel est-il ? Qu’Alain Soral est condamné en Suisse, où il réside actuellement, à une peine de prison ferme suite à la plainte d’une journaliste de La Tribune de Genève qu’il a traitée dans une vidéo en ligne de « grosse lesbienne » dans le cadre d’une sorte de dispute entre eux deux. Alors bon c’est tout sauf élégant et on n’en sera pas étonné outre mesure connaissant la finesse du personnage mais enfin, jusqu’à peu la grossièreté n’avait pas un caractère délictueux et on a peine à voir dans ces deux petits mots où réside le crime qui pourrait envoyer son auteur en prison.

Une épithète peu amène, certes, mais pas infamante pour autant : en effet il est de notoriété publique que cette journaliste est effectivement lesbienne (elle n’en fait pas mystère) et il faut bien admettre qu’elle n’a pas tout à fait une taille de guêpe. C’est peut-être indélicat de le mentionner mais ce n’est ni mensonger ni calomnieux. Le réel, donc, c’est qu’on peut aujourd’hui en Suisse croupir derrière les barreaux pour une simple insulte, et face à ce réel, il me semble que mon antipathie ou mes désaccords à l’égard de l’individu Soral n’ont pas à interférer dans mon appréciation : il fait en l’état les frais d’une loi liberticide qui ne devrait absolument pas avoir sa place dans une démocratie digne de ce nom.

Légende photo : Lors Roger Chudeau, président de l’association des parlementaires contre le wokisme et Jean-Paul Brighelli, écrivain et enseignant. Débat animé par David L’Épée, rédacteur en chef de Krisis.

Source : Au fil de L’Epée

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