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Librairie "Les Deux Cités"

Le livre hors la place : le contre-salon du livre des «Deux Cités», à Nancy

La Librairie « Les deux Cités », à Nancy, a ouvert ses portes l’an dernier, tout début octobre. Nous avions alors rencontré ses fondateurs et gérants, Sylvain Durain et Alexis Forget, alors qu’ils faisaient l’objet d’attaques et de manifestations de la gauche et l’extrême gauche locale. Un an plus tard, la librairie « Les deux Cités » est plus que jamais là. Elle organise même un salon du livre parallèle les 11 et 12 septembre, en marge du Livre sur la Place, le traditionnel salon nancéien. Bilan et perspectives.

ÉLEMENTS : Voilà presque un an, jour pour jour, que vous avez ouvert « Les deux Cités ». Quel bilan tirez-vous ?
ALEXIS FORGET. Un bilan très enthousiasmant. Par-delà les difficultés inhérentes à une création entrepreneuriale, le dédain des institutionnels et l’agressivité du camp du bien – au fanion rouge et noir – , nous avons eu à cœur de développer l’activité tant sur la partie librairie qu’éditoriale, entourés des amis et des clients fidèles.

ÉLEMENTS : Comment définiriez-vous l’identité des « Deux Cités » ?
ALEXIS FORGET. Cette identité, à travers l’image des deux cités, nous l’avons toujours voulue duale : tournée vers les choses de l’esprit avec l’image de la cité de Dieu1 et vers les choses de ce monde à travers la cité des hommes ; ainsi une partie catalogue est-elle tournée vers la philosophie et la religion quand l’autre est tournée vers les sciences sociales et politiques, ainsi que le régionalisme. Temps passant, nous avons enrichi le catalogue d’un rayon jeunesse et d’un rayon littérature classique (Barrès, Bloy, Bernanos, etc.).

ÉLEMENTS : Parallèlement au Salon Le Livre sur la place, qui se tient les 10, 11 et 12 septembre, à Nancy, vous organisez une sorte de contre-salon, ou de salon off. Pourquoi cette initiative ? Vous ne vous retrouvez pas dans la production éditoriale actuelle – ce qu’on comprendrait aisément ?
ALEXIS FORGET. Selon la brillante formule de Freund, « c’est l’ennemi qui vous désigne. Et s’il veut que vous soyez son ennemi, vous pouvez lui faire les plus belles protestations d’amitiés. Du moment qu’il veut que vous soyez son ennemi, vous l’êtes ». Les institutionnels à l’origine du salon Le Livre sur la place, à savoir les élus de la majorité municipale et l’association Lire à Nancy, qui regroupe les librairies de la ville, ont passé une année à dénigrer la petite librairie qui venait de s’installer, le tout naturellement accompagné de petites bassesses lorsqu’il nous arrivait de les solliciter. Dernière sollicitation en date quand nous avons souhaité obtenir un stand au salon nancéien Le livre sur la place, premier salon de la rentrée littéraire, pour la librairie et/ou la maison d’éditions du Verbe Haut : madame Canada, qui dirige l’association susnommée en tant que directrice de la plus grosse librairie de Nancy, n’a pas daigné nous répondre ; au moins avions-nous reçu, par courrier recommandé, une réponse de refus quand, l’an dernier, nous avions exprimé le souhait de rejoindre l’association Lire à Nancy.

C’est ainsi que l’idée a très récemment germé d’organiser notre propre événement, logiquement nommé Le livre hors la place accompagnée de la légende « l’événement littéraire des exilés de la place Carrière », place où se déroule la manifestation officielle.

ÉLEMENTS : Quels auteurs comptez-vous inviter pour quels événements ? La place Carrière étant occupée par le salon officiel, où comptez-vous installer le vôtre ?
ALEXIS FORGET. Pour cette première année, nous tiendrons salon dans la librairie elle-même et recevrons sur trois demi-journées six auteurs qui nous font l’amitié de leur participation, à savoir :

Pour le samedi 11 septembre matin, Fabien NIEZGODA ; pour le samedi après-midi, Laurent SCHANG et Jean-François THULL ; et, pour le dimanche 12 après-midi, Stanislas BERTON, Jean-Marie CUNY et Gilles Van GRASDORFF.

Nous travaillons d’ores et déjà sur l’organisation de 2022 avec des partenaires qui se sont fait connaître depuis l’annonce du Livre hors la place de cette année avec en sus, et Éléments est le premier dans la confidence, la création d’un prix littéraire.

ÉLEMENTS : Les attaques dont vous avez fait l’objet l’an dernier se poursuivent-elles ? Ou bien le coronavirus étant passé par là ou tout simplement la force de l’habitude, elles ne sont plus qu’un lointain souvenir ? Connaissant ces loustics, on les imagine mal au chômage, même technique…
ALEXIS FORGET. Avec la Covid est venue la paix à Eurasia1, la jeunesse manifestante ayant quitté les rues de la capitale des ducs de Lorraine. Néanmoins, depuis quelques jours, réouverture des écoles oblige, les rues s’emplissent à nouveau ; ne doutons pas que nous aurons matière à publicité dans les prochaines semaines.

ÉLEMENTS : Un des soucis qui vous animait lors du lancement de la librairie, c’était de sortir le public de la consommation culturelle et politique passive (les chaînes d’info en continu, le Web, les réseaux sociaux), de reprendre pied dans la cité, de redevenir physiquement visible, d’être un carrefour. Objectif atteint ?
ALEXIS FORGET. Autant que faire se peut avec la crise sanitaire traversée. Si nous avons pu organiser plusieurs rencontres et dédicaces, nous n’avons pas pu organiser les conférences que nous souhaitions. Peut-être les administrateurs de la chose publique nous permettront-ils qu’il en soit différemment cet automne. Peut-être. Au moins le 6 Grande Rue est-il devenu pour les habitués un lieu d’intelligence qui compte à Nancy : vous souhaitez échanger sur le gouvernement temporel de la Providence, sur le déclin de l’occident selon Spengler ou encore sur l’empirisme organisateur, vous êtes au bon endroit.

ÉLEMENTS : Des projets ?
ALEXIS FORGET. Plein. Trop peut-être mais il faut redire que nous sommes bien accompagnés. Nous poursuivons la montée en puissance dans les acquisitions d’ouvrages neufs et d’occasion, parallèlement aux manifestations organisées. Sur le plan éditorial, des nouvelles parutions verront le jour d’ici la fin d’année ; signalons notamment la parution d’une étude sur la critique sociale de Raymond Ruyer qui devrait faire date dans le milieu de la philosophie de la nature.

Lien : https://lesdeuxcites.fr

1. Saint Augustin, La Cité de Dieu contre les païens (lat. De civitate Dei contra paganos), 413-426.

2. Eurasia est un pays fictif de l’œuvre de Georges Orwell, 1984.

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