Dans un article du journal Le Monde paru le 23 juin 2024, Yann Raison du Cleuzio dresse un panorama du vote catholique et de sa mutation, au fil des ans. L’article donne le ton dès son intitulé : « Législatives 2024 : “Le vote des catholiques s’est éparpillé et radicalisé” ». Par « radicalisé », il faut bien entendu comprendre « droitisé ». On ne se radicalise jamais en se gauchisant, c’est un axiome. Si vous ne l’admettez pas, comment comptez-vous vous orienter dans cette géométrie idéologique ?
Jusqu’alors, poursuit l’auteur, « Les pratiquants réguliers ont souvent constitué un bloc résistant au vote Front national [FN, l’ancien nom du Rassemblement national], contrairement aux catholiques non pratiquants qui choisissent historiquement plus le parti lepéniste que le reste des Français. Longtemps, le vote FN a quasiment valu indice de détachement religieux, sauf dans les petites chapelles traditionalistes. »
Mais les choses ont bien changé, puisque le politiste constate une lame de fond qui modifie substantiellement les orientations politiques des catholiques : « Le vote en faveur du RN progresse depuis les élections régionales de 2015, en pleine vague d’attentats islamistes. À la présidentielle de 2022, parmi les pratiquants réguliers, Marine Le Pen obtient 21 % et arrive en seconde position derrière Emmanuel Macron à 25 % des voix (Ifop – La Croix). La hantise de l’islamisme, du déclassement culturel et une logique “dégagiste” attisée par l’échec des espoirs politiques nés de La Manif pour tous ont accéléré le détachement à l’égard de la droite modérée. En additionnant Le Pen, Zemmour, Dupont-Aignan et Lassalle, on obtient alors 42 % des pratiquants réguliers exprimant des votes que l’on peut qualifier de “contestataire” de droite ou d’extrême droite. »
Cette tendance à la « droitisation », voire à l’« extrême-droitisation » de l’électorat catholique n’a fait que s’accentuer lors des dernières élections. Un article du journal La Croix, daté du 10 juin 2024, signé Arnaud Bevilacqua, dresse le constat de faillite : « Européennes 2024 : les catholiques pratiquants ne font plus barrage à l’extrême droite. » Jérôme Fourquet, dans un entretien accordé à ce même journal en résume les motifs, dans une formule nette et lapidaire, qui me semble dire l’essentiel, du moins sur le plan de la conjoncture actuelle : « Les catholiques sont pris en tenaille entre le wokisme et l’Islam identitaire. »
Une droite dépeinte en hérétique
La contre-attaque ne devait pas tarder, et mêler ces froides statistiques aux vapeurs d’encens d’un catholicisme de gauche. C’est ainsi que Jean de Saint-Cheron est entré dans l’arène. La Croix, nous prévient le chroniqueur, « s’est intéressé au succès d’une frange identitaire du catholicisme, et a rappelé son incompatibilité avec le christianisme ». Le quotidien chrétien, qui figure parmi les titres de presse qui reçoivent le plus de subventions publiques, avec un montant de 9,3 millions d’euros par an, mérite toute notre attention, surtout quand il semble contredire à angle droit les orientations politiques de plus en plus répandues parmi les fidèles catholiques. Le journal chrétien serait-il séparé de sa base, à l’instar des élites déconnectées qui gouvernent le pays ?
S’il y a incompatibilité entre défense de l’identité et christianisme, à vous de vous arranger avec cette déclaration du pape François, pape pourtant taillé sur mesure pour ce genre d’anathèmes – si prompt à fustiger cette même « frange identitaire : « Exigeons que soient respectés les peuples autochtones, menacés dans leur identité et leur existence même », Twitter, 9 août 2016 (tirée du livre de Laurent Dandrieu, Église et immigration, Le grand malaise).
Il se trouve que, depuis plus de dix ans désormais, je n’ai jamais passé, je ne dirai pas un jour, mais une semaine, sans lire un ouvrage théologique. Les Pères de l’Église, les théologiens médiévaux dits scolastiques – en particulier saint Thomas d’Aquin et saint Bonaventure – et même de plus récents représentants de cette discipline, comme le père Henri de Lubac – Le drame de l’humanisme athée – et Hans Urs von Balthasar, auteur de La dramatique divine et de cette somme placée sous le signe du Beau, ce transcendantal trop souvent négligé, La Gloire et la Croix. Dans le domaine plus humblement profane, Bloy, Bernanos, Boutang et Chesterton sont de fidèles compagnons de mes pérégrinations spirituelles. Voilà d’où je parle…
Et je dois dire, après cette présentation succincte, que le vocabulaire théologique de Jean de Saint-Cheron m’est inconnu. Je ne trouve pas trace, ni chez les Pères de l’Église, ni chez les docteurs médiévaux ou même dans l’humble catéchisme de l’Église catholique, promulgué par Jean-Paul II autour de l’année 1992, de cette affirmation qui semble si évidente à l’auteur de cette chronique et sans doute au rédacteur en chef du journal puisqu’elle est reprise dans le chapô de l’article : « Le Christ est mort pour avoir fait voler en éclats le conservatisme sclérosé d’une classe dominante, l’attachement éperdu à un ordre bourgeois, à une civilisation matérielle fière d’elle-même. »
Des bondieuseries aux bourdieuseries
Théologie de la libération condamnée par l’Église, plus précisément par la Congrégation pour la doctrine de la foi à la tête de laquelle Jean-Paul II avait placé le futur pape Benoît XVI en qualité de préfet ? Lutte finale communiste ou eschatologie chrétienne ? Ne distribuons pas si facilement des anathèmes et des accusations d’hérésie même si monsieur Saint-Chéron ne s’en prive guère lorsqu’il déclare, à propos de la droite contemporaine qui instaurerait une « équivalence entre le message du Christ et le combat civilisationnel » que « cela est faux, grossier, et pas loin d’être hérétique ». Contentons-nous de soutenir, qu’à notre humble avis, notre chroniqueur est tout près de l’hérésie. Et s’il n’y a pas équivalence entre le message du Christ et le combat civilisationnel – ce dont je conviens –, rien ne s’oppose à ce qu’il y ait convergence.
Il récuse pourtant l’interprétation marxisante qu’on pourrait faire de ses propos, en fustigeant ceux qui « voudraient aujourd’hui (de façon discutable) faire du Christ un marxiste ». Mais alors, à quelle chapelle gauchiste doit-on ce vocabulaire d’émancipation sociale en guise d’exégèse christologique ? La sociologie de Bourdieu ? Bourdieu est le bon Dieu des sociologues. La sociologie s’étant substituée à la théologie, c’est tout naturellement que les bourdieuseries devaient prendre la place des bondieuseries ! Ou plus classiquement la théologie des catholiques libéraux, s’employant à faire des « rapprochements blasphématoires entre l’Évangile et la Révolution », selon la formule de saint Pie X ? Tout cela me rappelle ce bon vieux Camille Desmoulins déclarant sans ambages : « Jésus… premier sans-culotte ».
Vomir les tièdes et les mièvres
Quoi qu’il en soit, je suis un incroyant de ce catéchisme nouveau, tout à fait hérétique sur ce point, et attends le saint Irénée de ce catholicisme rénové de pied ferme ! Je vais le scolastiquer jusqu’à lui faire rendre gorge. Comme l’adage si cher à Jacques Maritain le prononce, de quoi faire s’époumoner les hérésiarques modernistes : Vae Mihi, si non thomistizavero ! Je pense, pour ma part – pour aggraver mon cas – que la Révolution française est antichrétienne fondamentalement. Par principe, non par accident. Comme on dit en langage scolastique : per se, non per accidens. Et avec Nicolás Gómez Dávila, qu’« en pensant ouvrir les bras au monde moderne, l’Église a fini par lui ouvrir les cuisses ». Je pense, pour faire bonne mesure, que les catholiques modernistes, qui se soucient davantage d’émancipation sociale que de majesté divine et de rédemption surnaturelle, ont travaillé à la dissolution du Christ.
Gustave Thibon, dans Retour au réel, avait déjà étrillé ce genre d’accointances entre christianisme et mystique démocratique, discours de gauche et foi surnaturelle : « Tout esprit vraiment chrétien éprouve, en présence de telles formules, un sentiment de malaise : il voit là des vérités divines prostituées, il se sent en face d’un nouveau pharisaïsme. » Avant de conclure : « Jadis, les choses de la religion empiétaient sur celles de la politique (qu’on songe aux époques de théocratie, à la Bulle des deux glaives, etc.), mais, depuis longtemps déjà, c’est le contraire qui se produit : la fièvre politique tire à elle la plupart des énergies religieuses de l’humanité. La recherche du bien suprême est devenue une “question sociale”. » Et oui, car « le Christ est mort pour avoir fait voler en éclats le conservatisme sclérosé d’une classe dominante, l’attachement éperdu à un ordre bourgeois, à une civilisation matérielle fière d’elle-même. »
Reprenons le pas d’origine. « En ce premier quart du XXIe siècle, écrit Saint-Cheron, comme l’a bien montré Yann Raison du Cleuziou, la frange la plus identitaire et réactionnaire du catholicisme est de nouveau la plus visible, la plus bruyante, la plus notoire. Jusqu’à invisibiliser celle, plus nuancée et sociale, encore importante mais vieillissante, de ces catholiques qui assimilent tout bulletin de vote d’extrême droite à un péché mortel. » « Plus nuancée » fait rêver… Le « Je vomis les tièdes ! » de Jésus-Christ est-il assez « nuancé » aux yeux des catholiques sociaux et libéraux ? C’est une ironie dont je mesure la portée tragique de devoir rappeler au journal La Croix l’injonction évangélique à « ne pas évacuer la croix » !
Les nouveaux péchés
Et puis cette vogue des nouveaux péchés ! On en a soupé ! Qu’ils sont inventifs pourtant reconnaissons-le ! Du péché contre les migrants au péché du bulletin de vote d’extrême droite, c’est une manie d’inventer de nouveaux péchés dans vos parages. À part ça, vous n’instrumentalisez pas la foi à des fins politiques ! Non… Ce domaine nauséabond de la récupération partisane de la religion est l’apanage exclusif de la vilaine droite identitaire.
Poursuivons l’homélie du père Saint-Cheron : « Il y a certes un retour vigoureux, chez des jeunes fortement politisés, d’un christianisme s’assumant à gauche, anticapitaliste et écologiste (les groupes du Dorothy du Simone, du collectif Anastasis…), mais il a la décence d’être moins éhontément moderne (c’est nous qui soulignons) que son équivalent à droite, qui utilise à plein les armes de la communication d’un monde qu’il est censé haïr : plateaux télé, punchlines, tweets débordant d’autosatisfaction et de propos caricaturaux. Nettement plus intellectuel, il concerne à ce jour beaucoup moins de monde. »
De qui se moque-t-on ? Après l’anathème « réactionnaire » voilà que la droite est conspuée parce qu’elle serait « éhontément moderne » ! Il faudrait savoir ! Ce « nettement plus intellectuel » est d’une prétention folle, en outre. Vous ne trouvez pas ?
S’ensuit une mise au point sur le bon usage herméneutique et politique de Charles Péguy :
« Il pourrait être intéressant, mesdames, messieurs les chroniqueurs de droite, de remettre la phrase dans son contexte : celui de l’affaire Dreyfus et de la haine du “parti juif”. Parce qu’alors même que Péguy a mis son génie à se battre contre la récupération politique par Jaurès du dreyfusisme, il l’a également pointé contre toute la droite conservatrice française, sa haine de l’étranger, du métèque. Contre ses “valeurs” bourgeoises, intrinsèquement contraires au christianisme (cf. Monsieur Laudet, 1911).
« Le Christ a fait voler en éclats le conservatisme sclérosé.
« Et cette droite qui croit citer Péguy tellement à propos pour justifier son point de vue pourrait méditer une formule tirée de Notre jeunesse, dont elle ne cite décidément que ce qui l’arrange : “Il est incontestable que dans tout notre socialisme même il y avait infiniment plus de christianisme que dans toute la Madeleine ensemble avec Saint-Pierre de Chaillot, et Saint-Philippe du Roule, et Saint-Honoré d’Eylau.” Alors que certains voudraient aujourd’hui (de façon discutable) faire du Christ un marxiste, il est au moins aussi incongru de faire de lui un capitaliste ou un réactionnaire. »
La nouvelle bien-pensance
Cette stratégie de l’homme de paille qui consiste à se tailler un adversaire sur mesure pour lui livrer une bataille gagnée d’avance est très divertissante. En effet, que saurons-nous de la « droite conservatrice », sinon « sa haine de l’étranger, du métèque » que côtoient « des “valeurs” bourgeoises ». En somme, vous êtes tous des pourritures ! Puis vient le double tocsin : « capitaliste et réactionnaire ». Je croyais qu’ils étaient « éhontément modernes »… Comment peuvent-ils alors être réactionnaires ?
Taquinons-le encore un peu et rétorquons à son « et cette droite qui croit citer Péguy tellement à propos » par un « et cette gauche qui croit citer Bernanos tellement à propos ». Notre sépulcre blanchi cite cette phrase écrite par l’écrivain catholique : « Homme de gauche non plus qu’homme de droite, que voulez-vous que je sois ? Je suis chrétien. » Bernanos, dans La grande peur des bien-pensants, écrit à propos de la démocratie : « à l’encontre de ce qu’affirment chaque jour les beaux esprits, cette prétendue évolution démocratique, dont on voudrait faire on ne sait quel phénomène cosmique, n’est qu’un médiocre incident de notre histoire, le signe extérieur d’une conquête politique, qui ne saurait tenir éternellement les âmes asservies, et dont il reste l’espoir de briser la force, un jour, par le fer et par le feu. » Cette autre citation ne sied guère à notre auteur ?
La Croix ne mentionne la droitisation des catholiques que pour le déplorer. Mais réveillez-vous, votre théologie rapiécée avec des lambeaux de gauchisme et d’humanitarisme sirupeux est dépassée, moribonde, morte d’emblée puisqu’originellement faisandée ! Le journal fait dans la théologie grabataire, la foi à la naphtaline, dans la gérontothéologie, si vous me permettez le néologisme.
On voudrait faire du christianisme le levier des idéologies progressistes, émancipatrices, par des rapprochements douteux. Dans cet ordre, l’égalitarisme chrétien est devenu le pont aux ânes de l’argumentation pour ou contre cette doctrine. Égalitarisme chrétien, je demande à examiner la question. Consultons saint Thomas d’Aquin, docteur commun de l’Église. Dans la Somme théologique, question 47, article 2 de la Prima Pars, voici ce qu’il écrit : « La Sagesse de Dieu, qui est cause de la distinction entre les êtres, est aussi cause de leur inégalité. » Avant d’ajouter, pour bien enfoncer le clou : « De même que la Sagesse divine est cause de la distinction entre les choses, pour la perfection de l’univers [c’est nous qui soulignons], ainsi est-elle cause de leur inégalité. Car l’univers ne serait point parfait si l’on ne trouvait dans les êtres qu’un seul degré de bonté. » L’inégalité comme condition préalable à la perfection de l’univers… L’égalité postulée par le christianisme est une égalité de rapport, égalité devant Dieu, très uniquement devant Dieu.
Toujours du bon côté
Il convient, selon Saint-Cheron, de « relire l’Évangile » pour se persuader d’une incompatibilité entre la droite identitaire et le catholicisme, voilà une invitation à laquelle je ne saurais que m’associer. Et pourtant, j’ai beau en consulter les versets avec toute l’attention dont je suis capable, je n’en tire pas les mêmes conclusions. Dieu m’est témoin que je ne suis pas plus avisé que saint Jérôme, lui qui écrivait à Paulin de Nole, à propos de l’étude des Textes sacrés : « Je ne suis pas si présomptueux ni si peu raisonnable que je me flatte d’avoir l’intelligence de toutes ces choses, non plus que de prétendre saisir les fruits de ces arbres qui ont leurs racines dans les cieux. J’avoue néanmoins que je m’y efforce, et je crois faire mieux que de ne rien faire si, me récusant comme maître, je viens en compagnon d’étude. Il est dit qu’à celui qui demande il sera donné, qu’à celui qui frappe il sera ouvert, et que celui qui cherche trouvera. »
Nous devrions y découvrir ce que le chapeau annonçait, à savoir ce que Jean de Saint-Cheron rappelle : « Le Christ est mort précisément pour avoir fait voler en éclats le conservatisme d’une classe dominante. » Et pourtant, le Christ commande l’obéissance à l’égard du pouvoir politique – « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » – et à l’autorité religieuse, en l’occurrence le Sanhédrin qui le condamnera à mort par crucifixion, ce à quoi il aurait pu se soustraire puisqu’il déclare à Ponce Pilate : « Omnia potestas data est mihi in celo et in terra » (« Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. » Et saint Paul ne dit-il pas : « Nulla potestas nisi a deo » (« Aucun pouvoir qui ne vienne de Dieu »). Notre chroniqueur « rappelle » sans doute que « le Christ est mort précisément pour avoir fait voler en éclats le conservatisme d’une classe dominante », mais ne démontre rien… En outre, il ne se rend pas compte que c’est lui qui fait preuve de conservatisme d’une classe dominante, celle-ci étant – de Macron au pape François – parfaitement hostile à la frange identitaire. Il faut choisir entre les catacombes du réprouvé, du persécuté, et la chaire du Pontife, cher Monsieur. Vous êtes indéniablement du bon côté du manche ou plutôt de la crosse de l’évêque !
Maurras : « La Prière de la fin »
Enfin, il nous est dit, tout à trac – sans aucune justification – que « héraut acharné du catholicisme civilisationnel, Maurras est peut-être l’écrivain le moins chrétien que la France ait connu ». Bourdieu est, par conséquent, si on va au bout de cette logique, un écrivain plus chrétien que Maurras ! Saint Pie X, moins éclairé en fait de christianisme, soutenait que Maurras était « un beau défenseur de la foi ». Qui faut-il croire ? Mon cœur balance… Notre sociologue connaît-il « La Prière de la fin », l’ultime poème de Maurras :
« Seigneur, endormez-moi dans votre paix certaine
Entre les bras de l’Espérance et de l’Amour.
Ce vieux cœur de soldat n’a point connu la haine
Et pour vos seuls vrais biens a battu sans retour.
Et pour vos seuls vrais biens a battu sans retour.
Le combat qu’il soutint fut pour une Patrie,
Pour un Roi, les plus beaux qu’on ait vus sous le ciel,
La France des Bourbons, de Mesdames Marie,
Jeanne d’Arc et Thérèse et Monsieur Saint Michel.
Notre Paris jamais ne rompit avec Rome.
Rome d’Athènes en fleur a récolté le fruit,
Beauté, raison, vertu, tous les honneurs de l’homme,
Les visages divins qui sortent de ma nuit :
Car, Seigneur, je ne sais qui vous êtes. J’ignore
Quel est cet artisan du vivre et du mourir,
Au cœur appelé mien quelles ondes sonores
Ont dit ou contredit son éternel désir
Et je ne comprends rien à l’être de mon être,
Tant de Dieux ennemis se le sont disputé !
Mes os vont soulever la dalle des ancêtres,
Je cherche en y tombant la même vérité.
Écoutez ce besoin de comprendre pour croire !
Est-il un sens aux mots que je profère ? Est-il,
Outre leur labyrinthe, une porte de gloire ?
Ariane me manque et je n’ai pas son fil.
Comment croire, Seigneur, pour une âme que traîne
Son obscur appétit des lumières du jour ?
Seigneur, endormez-la dans votre paix certaine
Entre les bras de l’Espérance et de l’Amour. »
Le journal le moins chrétien que la France ait connu
« Maurras est peut-être l’écrivain le moins chrétien que la France ait connu… » Je pourrais aussi suggérer à l’auteur la lecture de la correspondance entre Maurras et l’abbé Penon, très instructive, ou encore le petit livre de Jean Madiran, qui pointe les fortes convergences entre la pensée de Maurras et le thomisme, et, soyons fou, le monumental ouvrage écrit par Pierre Boutang, qui fait la lumière sur cette question et tant d’autres : Maurras, La destinée et l’oeuvre. Peut-être parviendra-t-il à des conclusions « plus nuancées » dont peuvent se faire gloire des cercles « nettement plus intellectuels », sans faire pour autant de Maurras un catholique de stricte obédience, ce qu’il n’est pas, en effet…
Pour finir, voici la conclusion : « Si le populisme permet de conjurer la crainte du déclassement des chrétiens, le christianisme permet de conjurer la crainte du multiculturalisme des populistes. » Ces deux craintes sont parfaitement infondées, bien sûr…
« Ces nouveaux théologiens, au lieu d’accommoder la vie des hommes aux préceptes de Jésus-Christ, ont entrepris d’accommoder les préceptes et les règles de Jésus-Christ aux intérêts, aux passions et aux plaisirs des hommes. » Blaise Pascal.
La messe est dite ! Ou plutôt Ite Missa est !