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Albert Uderzo

Le ciel est tombé sur la tête d’Albert Uderzo !

Le dessinateur d’Asterix s’est éteint dans la nuit du lundi 23 à mardi 24 mars, à l’âge de 92 ans. Uderzo rejoint ses complices de toujours, René Goscinny avec qui il a dessiné 24 albums d’Astérix, et Jean-Michel Charlier, avec qui il a créé Les Aventures de Tanguy et Laverdure. Notre hommage alors qu’Éléments consacre son prochain numéro, à paraître jeudi 26 mars, à la géopolitique de la bande dessinée.

C’est une certaine Gaule qui est en deuil à l’annonce de la mort d’Albert Uderzo, survenue ce 24 mars. Alberto, né de parents italiens le 25 avril 1927, à Fismes, dans un village de la Marne, retira en effet lui-même le « o » de son prénom « afin de faire plus français » ! Après la disparition prématurée de son compère René Goscinny en 1977, le dessinateur avait fait le choix de continuer Astérix seul, avant de prendre une retraite méritée en 2013 et de céder la main aux piètres Jean-Yves Ferri et Didier Conrad. Uderzo aura réalisé seul neuf aventures d’Astérix et porté le « héros gaulois » jusqu’au sommet, à plus de 375 millions d’albums vendus dans le monde. Ce n’est pas insulter sa mémoire que de retenir surtout les vingt-quatre albums écrits par le duo, d’Astérix le Gaulois lancé dans le premier numéro de Pilote en octobre 1959 (où Uderzo dessina également les premiers aventures de Tanguy et Laverdure, scénarisées par Jean-Michel Charlier) jusqu’à Astérix chez les Belges, achevé vingt ans plus tard.

Un des maîtres du style « gros nez »

On a beaucoup glosé sur les lectures politiques de cette série-phare de la bande dessinée, en mettant par exemple en parallèle son succès dans les années 1960 avec l’apogée du gaullisme. On peut à la fois, comme le faisaient les auteurs eux-mêmes, hausser les épaules devant les sur-interprétations de l’œuvre, et reconnaître les évidents clins d’œil qui émaillent des albums dont l’humour se nourrit d’anachronismes volontaires et de références à l’époque des auteurs (la frénésie immobilière du Domaine des Dieux ; le développement du tourisme, par exemple dans Astérix en Hispanie…). Régulièrement d’ailleurs, Uderzo s’y révèle non seulement un des maîtres du style « gros nez », mais aussi un habile caricaturiste, croquant aussi bien ses amis (l’omniprésent Pierre Tchernia) que diverses célébrités du spectacle ou de la politique, tel Jacques Chirac qui prête ses traits au jeune technocrate libéral d’Obélix et compagnie, en 1976.

On retiendra que les deux amis Uderzo et Goscinny, conjuguant miraculeusement leurs talents après quelques autres collaborations communes dans les années 1950 (Oumpah-Pah), avaient su, avec Astérix, non seulement jouer subtilement avec les stéréotypes identitaires (cf. Nicolas Rouvière, Astérix ou la parodie des identités, Champs Flammarion, Paris 2008), mais également créer et mettre en scène un véritable archétype. Le « village des irréductibles Gaulois » ou la « potion magique » sont rapidement entrés dans le langage courant ; et ce sont assurément les dessins d’Uderzo qui, pour longtemps, nous viendront à l’esprit chaque fois qu’on les emploiera.

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