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La nouvelle histoire de nos origines révélée par David Reich

David Reich a la claire conscience de travailler dans un domaine où existe un sérieux risque de confrontation avec des présupposés idéologiques qu’il s’agisse de l’origine des Indo-Européens ou de la notion de race.

C’est peu dire que le livre de David Reich (Comment nous sommes devenus ce que nous sommes. La nouvelle histoire de nos origines, éditions Quanto, 380 p.) était attendu. Disons-le d’emblée : le travail qui en forme la substance constitue une prouesse non seulement irréalisable mais même inimaginable voici quelques années seulement. Reich travaille sur l’ADN ancien. Après avoir appris la technique auprès du pionnier Svante Pääbo, un chercheur finlandais dirigeant un important groupe en Allemagne, il a ouvert un laboratoire à l’université Harvard donnant à ce type de recherche une dimension quasi industrielle.

Au titre des prouesses permises par ces techniques figurent non seulement le séquençage de plusieurs génomes d’hommes de Néandertal mais aussi la découverte d’un humain ancien qui doit tout ou presque à la génétique, celle de l’homme de Denisova. De ce dernier, on ne disposait que d’une dent. Mais l’étude de son ADN prouve qu’il s’agit d’un être à part, ni néandertalien ni sapiens.

Pääbo, Reich et d’autres ont démontré que ces deux hommes fossiles ont laissé des gènes chez les Européens (pour ce qui est de Néandertal) et chez les Asiatiques (en ce qui concerne ces deux types d’humains disparus). Le décodage des génomes anciens ne constitue pas la seule prouesse technique développée par Reich et ses collègues. L’examen d’un unique génome actuel constitue aussi une mine, exploitée comme la précédente à l’aide de paradigmes mathématiques et susceptible de témoigner des hybridations passées.

On doit surtout à Reich des études sur des humains relativement récents (moins de 40 000 ans) car il reste extrêmement difficile de récupérer de l’ADN très ancien. Elles prouvent que tous ces êtres du passé n’ont cessé de migrer d’un lieu à un autre, déplaçant souvent les populations locales. S’agissant de l’Europe, elles confirment une assez grande homogénéité génétique, notamment à partir de la culture dite de l’Aurignacien pour laquelle on peut distinguer au moins deux groupes, un à l’Est (représenté par un fossile en Russie) et un autre à l’ouest (avec un fossile belge). Nous sommes à peu près tous, à des degrés divers, descendants de ces humains. Reich ne s’est pas contenté de l’étude de ces hommes anciens. Décodant des centaines de génomes, il apporte des informations relatives à toutes les époques passées et notamment à l’origine des Indo-Européens dont il fait, sans en méconnaître les conséquences politiquement délicates, un groupe génétiquement homogène quoique descendant d’une population hybridée, celle des Yamna habitant les steppes à l’est de l’Europe.

Reich aborde également, décodages génétiques à l’appui, le cas des populations non-européennes, d’Inde (ayant elle aussi hérité des Yamna une langue indo-européenne), de Chine, d’Amérique et d’Afrique. Ce dernier continent apparaît essentiel à plusieurs égards : il constitue la terre des vestiges préhumains les plus anciens et celles des groupes actuels différenciés depuis le plus longtemps, à savoir les San (anciennement appelés Bochimans) d’Afrique Australe ainsi que les Pygmées de la forêt. Quant aux Noirs, il est intéressant de constater qu’ils présentent une hétérogénéité génétique plus importante que les autres populations.

David Reich a la claire conscience de travailler dans un domaine où existe un sérieux risque de confrontation avec des présupposés idéologiques qu’il s’agisse de l’origine des Indo-Européens ou de la notion de race. Il n’en aborde pas moins ces thèmes avec clarté constatant tout à la fois le rôle essentiel des migrations et des croisements au sein de l’espèce humaine (ruinant par là-même toute notion de race « pure ») et la réalité des différences génétiques entre populations, validant ainsi de facto la notion de race ce qui lui vaut bien évidemment quelques critiques ; ceux qui nient totalement l’existence des races le jugent suspect en dépit de l’antiracisme qu’il professe; ceux qui se croient descendants d’une lignée pure exempte de toute forme de métissage lui en voudront tout autant de leur ôter leurs illusions. L’attitude la plus saine est, comme toujours, de respecter les faits tels que la science les révèle. Donc de lire Reich.

Source : breizh-info

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