L’automne dernier, j’ai été invité à prononcer quelques mots lors d’une conférence organisée par l’Intercollegiate Studies Institute. J’intervenais devant une assemblée convaincue de l’importance de l’œuvre de Renaud Camus, penseur français souvent mal compris et injustement décrié, à l’origine de l’idée du « Grand Remplacement » – concept fréquemment déformé. Ce dernier n’est pas une « théorie du complot », car Camus n’y postule aucune conspiration, mais observe simplement un changement culturel et démographique radical, fruit de la modernité libérale et liquide. Mes remarques s’appuyaient sur mes précédents écrits sur le colonialisme et la « lutte anticoloniale », et je n’avais pas prévu de les publier sur Substack. Cependant, le débat mérité qui fait rage au Royaume-Uni à propos des gangs de proxénétisme, de la migration et de l’abandon délibéré des enfants du pays au nom du multiculturalisme m’a poussé à revoir ce discours. Le voici donc.
Dans ses écrits, Renaud Camus décrit de manière frappante, bien que succincte, le remplacement en cours des peuples et des cultures occidentales comme une forme de « contre-colonisation », ou plus simplement de « colonisation » tout court. Je trouve ce mot fascinant : colonisation. Car si Camus parle naturellement de colonisation dans le contexte des migrations massives – soulignant l’ironie des anciennes puissances coloniales européennes submergées par les peuples qu’elles ont elles-mêmes colonisés –, je pense que cette idée va bien au-delà.
En fait, si l’on envisage le monde occidental comme étant soumis à un processus de colonisation, cela permet non seulement d’expliquer le phénomène des migrations incontrôlées, mais aussi la notion plus large de « remplacisme » que Camus s’efforce de documenter et de décrire, au prix de sa réputation dans les cercles respectables. De plus, cette perspective peut, à mon sens, éclairer les causes profondes du déclin culturel et des conflits politiques qui ravagent l’Occident aujourd’hui, y compris la grande réaction populiste que nous avons récemment observée lors de l’élection américaine.
En mettant de côté les diatribes gauchistes sur la « décolonisation » auxquelles nous sommes habitués, il est temps d’examiner sérieusement ce que le processus de colonisation implique en pratique et dans l’histoire.
Les impératifs de la colonisation
Universellement, le premier impératif de la colonisation est la dénationalisation. La colonisation est menée par des empires – des entités politiques supranationales qui contrôlent de nombreuses nations ou peuples sous un même parapluie impérial. L’antithèse de l’empire est l’identité nationale et l’autodétermination des nations. C’est pourquoi la tâche principale d’un colonisateur est souvent la suppression ou l’effacement de la conception qu’a une population d’elle-même en tant que peuple cohérent, doté d’une identité culturelle distincte et d’un territoire historique défini.
Le second impératif est un processus de déculturation. Il s’agit de dépouiller un peuple de sa culture, de ses coutumes, de ses croyances, de ses valeurs et de sa langue traditionnelles. Ce processus implique une rupture avec les racines historiques et l’abolition de la mémoire collective, par le biais de la censure, de la propagande, de l’endoctrinement et de la désacralisation des religions traditionnelles. Souvent, ce sont les enfants qui sont ciblés, parfois en étant volontairement séparés de la culture de leurs parents pour être élevés à part. Cette déculturation est généralement présentée comme un processus civilisateur bienveillant, une libération des manières « arriérées » ou « barbares » en sorte d’adopter les valeurs et modes de vie supposément supérieurs des maîtres coloniaux.
Pour maintenir leur contrôle, les pouvoirs coloniaux emploient également une stratégie caractéristique du diviser pour mieux régner : ils établissent une hiérarchie sociale et politique qui privilégie artificiellement une ou plusieurs minorités ethniques ou religieuses pour régner sur la majorité autochtone. Ce système multiculturel administratif engendre des tensions raciales et sectaires qui finissent par éclater.
Parallèlement à cette dépossession culturelle et politique, il y a une exploitation économique. Les terres et ressources des autochtones sont souvent saisies ou progressivement rendues inaccessibles. Les structures impériales sapent les industries nationales, piégeant les peuples dans un réseau complexe de dettes inextricables.
Enfin, l’un des moyens les plus radicaux de transformation coloniale est le déplacement démographique par l’immigration massive. Ce déplacement affaiblit la majorité culturelle et politique des autochtones, réduisant leur contrôle sur les institutions et ressources, et les transforme en étrangers sur leur propre terre.
Une colonisation intérieure
Si ces mécanismes de colonisation vous semblent familiers, c’est parce que les symptômes sont identiques partout en Occident. Des élites dirigeantes oikophobes expriment régulièrement leur mépris pour leurs concitoyens, les qualifiant de rétrogrades ou de sauvages. Des campagnes concertées cherchent à inculquer la honte du passé, à effacer les marqueurs culturels distinctifs et à réécrire les histoires nationales.
Plus flagrante encore est l’immigration massive, une vague démographique et culturelle qui, malgré des années de protestations publiques, reste encouragée par les élites. Ce phénomène ne peut être décrit autrement que comme une forme étrange de colonisation. Mais par qui ? Par un empire étranger ? Non. Ce sont nos propres régimes qui semblent s’être engagés dans ce processus, comme une auto-colonisation de l’Occident.
Le rôle du remplacisme
Ici, l’intuition de Camus s’avère précieuse. Il rappelle qu’aucune conspiration n’est nécessaire pour expliquer cette colonisation. Ce qui est à l’œuvre, c’est la force irrésistible de la modernité qu’il appelle remplacisme : une « alliance de convenance » entre le moralisme antiraciste d’après-guerre et le capitalisme managérial globalisé. L’objectif ? Une homogénéisation complète des individus, réduits à une matière humaine interchangeable.
Comme Camus l’écrit, ce projet ne vise pas seulement à effacer les nations, mais à éradiquer l’idée même de nation ; pas seulement une culture, mais l’idée même de culture.
Une lutte anticoloniale nécessaire
Pourtant, à travers l’Occident, les peuples natifs deviennent de plus en plus nerveux. Ce que certains appellent une révolte populiste pourrait être décrit plus justement comme une lutte anticoloniale. L’idéologie du remplacisme, par son absence totale d’amour pour le particulier, révèle par contraste la force opposée : l’amour de ce qui est sien. Cet amour n’est pas une haine de l’autre, mais une célébration de ses propres racines.
Ainsi, je vous encourage à prendre fièrement part à cette lutte anticoloniale et à contribuer à la renaissance de vos nations.
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