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Éric Dupond-Moretti : l’apothéose du sang-mêlé

En direct de l’hôtel de Bourvallais, Xavier Eman relate pour Éléments les premières heures de l’installation d’Éric Dupond-Moretti au ministère de la Justice.

Au troisième étage du 13, place Vendôme, Éric avait renvoyé son directeur de cabinet aux préparatifs de son prochain déplacement et demandé à sa secrétaire de n’être pas dérangé. Il voulait pouvoir pleinement et sereinement savourer l’instant. Assis derrière son bureau, enfoncé dans le cuir moelleux d’un fauteuil immense, il n’était en effet pas loin du bonheur absolu, de la satisfaction complète, de la béatitude extatique.

Sous les ors de la République, dans une pièce jadis hantée par Michel Debré ou Robert Badinter, il était enfin « arrivé ».

Un bagout de bateleur de foire

Lui, le spadassin de toutes les causes, même les moins ragoûtantes, lui, le provocateur médiatique « fier » d’être aux côtés d’Abdelkader Merah ou des accusés d’Outreau, lui l’enfant de pauvre, lui le Franco-Italien (« sang-mêlé » avait-il réussi à proclamer sans rire lors de son intronisation, histoire de se placer immédiatement dans le sens du vent du métissage adulé), lui le plouc du Nord à la trogne bouffie d’abonné au PMU, il était désormais garde des Sceaux, maître de la justice ! Quelle ascension, quel triomphe !

Il est vrai qu’il disposait de toutes les qualités et des atouts pour réussir une brillante carrière politique : un bagout de bateleur de foire, un métier qui lui avait appris l’indifférence totale à la vérité, seuls comptant les intérêts de ses clients et donc, par ricochet, les siens, et une intelligence aiguisée lui permettant de saisir et d’utiliser tous les conformismes et les démagogies du temps, comme il l’avait brillamment démontré en plaçant son ministère sous l’égide de « l’antiracisme et des droits de l’homme », les deux hochets sacrés de la post-modernité finissante. De plus, il bénéficiait d’une importante « surface médiatique » et les voyous l’adoraient. Se faire applaudir par la population carcérale de Fresnes, lors de sa première visite officielle, pour un garde des Sceaux, c’était une première, une indéniable nouveauté, un symbole fort, d’une délicieuse originalité, la marque d’une véritable « accélération » dans la transformation de la justice, la victime cédant encore un peu plus la place au criminel au centre des attentions bienveillantes de celle-ci. Et tout ça grâce à la « personnalité atypique » de cet « ogre du Nord », champion national toutes catégories de l’acquittement !

L’interdiction du Rassemblement National

Les yeux mi-clos, Éric repensait avec contentement à tout ce chemin parcouru et commençait à rêver aux grandes réformes qui marqueraient son passage à la tête de ce prestigieux ministère… Par quoi allait-il commencer ? La PMA-GPA pour tous et toutes de 7 à 77 ans ? L’interdiction du Rassemblement National ? Ah ! non, ça, ce serait trop délicat, le patron, Emmanuel, en ayant encore besoin pour assurer sa réélection… 

Il fût soudain tiré de ses ambitieuses réflexions par la sonnerie de son téléphone portable qu’il décrocha en maugréant légèrement.

– Allo ?

– Allo, Éric ? C’est Patoche !

– Bonjour Patrick. Ca va ?

– Je t’appelais pour te féliciter ! Quelle grande nouvelle !

– Je te remercie.

– Je peux te dire qu’avec Isabelle, on a sablé le champagne pour fêter ça !

– C’est gentil…

– Ah ben quand même ! C’est pas rien ! La fin des ennuis judiciaires, c’est quelque chose ! Ca commençait drôlement à nous peser…

– Oui… enfin… tu sais… Les choses ne sont pas aussi simples que ça…

– Oui, oui, je sais… T’inquiète ! Enfin… on se comprend quoi… Par contre, j’ai quand même un petit regret…

– Lequel ?

– Que tu n’aies pas été nommé quelques mois plus tôt… Comme ça, avec maman, on aurait pu se représenter à la mairie… Enfin bon, ne nous plaignons pas, on ne peut pas tout avoir non plus ! C’est sûr. Bon, je te laisse mon Éric, on se voit bientôt !

– Au revoir.

Éric reposa son smartphone sur le bureau dans un long et épais soupir puis griffonna quelques mots sur son agenda. Dans la rubrique « À faire d’urgence », on pouvait lire : « Penser à changer de numéro de téléphone portable. »

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