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Épuration à Trappes : Omar Sy chasse Jean Renoir

Épuration à Trappes : Omar Sy chasse Jean Renoir

L’édile de Trappes, dans les Yvelines, une des capitales du djihad, vient de débaptiser pompeusement le cinéma municipal Jean Renoir : ce sera désormais celui d’Omar Sy. Michel Marmin ne pouvait laisser passer cette épuration toponymique.

Que le maire franco-marocain de Trappes, M. Ali Rabeh, ait débaptisé le cinéma municipal Jean Renoir pour l’appeler Omar Sy, c’est au fond dans l’ordre des choses. Trappes est une commune très islamisée, tendance Frères musulmans, et entre l’islam et le cinéma panthéiste d’un réalisateur amoureux de la beauté des femmes et apologiste du plaisir, il y avait une incompatibilité qu’il fallait résoudre. Omar Sy, qui fut incontestablement drôle en ses débuts à la télévision avant d’être promu au rang de conscience nationale, était l’homme de la situation. Natif de Trappes d’abord, il avait surtout le mérite d’avoir donné des gages de correction politique et de pureté morale en faisant barrage de sa vaste poitrine à la déferlante lepéniste puis, surtout, en quittant courageusement cette France qui lui répugnait et qui lui faisait peur pour s’installer, avec armes et bagages, aux États-Unis où, chacun le sait, le sort des Noirs est infiniment plus enviable que chez nous… Il est vrai qu’Omar Sy, pas con, n’a pas choisi le South Bronx pour y installer ses pénates, mais la Californie. Peut-être y caresse-t-il le rêve d’un destin à la Obama ? En cas d’échec, il pourra toujours briguer la mairie de Trappes et tenir la caisse de son cinéma !

C’est qui, ce céfran ?

Mais revenons à Jean Renoir. L’éradication de son nom pourrait être mise sur le compte de l’inculture d’un édile : « Renoir, c’est qui ce bouffon ? » Mais, nous l’avons dit, il y avait surtout incompatibilité entre ce nom et l’écrasante majorité musulmane de la population (70 %). Parmi les natifs de Trappes personnifiant une idée plus reluisante de la culture française, un autre aurait-il pu être choisi ? Un administré un peu cultivé aurait pu suggérer à M. Ali Rabeh le nom de Jacques Perret, mais les fidélités royalistes, religieuses et coloniales de l’auteur génial du Caporal épinglé lui auraient interdit tout espoir d’être retenu pour cet honneur. Honneur que Perret lui-même aurait de toute évidence hautement refusé s’il avait encore été de ce très bas monde, car c’eût été en réalité un déshonneur, comme se sont déshonorés les écrivains qui, à la Libération, ont pris la place de leurs confrères exclus de l’Académie française… Et puis, circonstance aggravante, Le Caporal épinglé avait été porté à l’écran en 1961 par Jean Renoir lui-même, soit à une époque de sa vie et de sa carrière où certains critiques croyaient (ou voulaient) voir dans ses derniers films la marque d’un affaiblissement radical de son art, ainsi qu’un ralliement à des idéaux réactionnaires !

Précisons quand même que d’autres, au contraire, y reconnaissaient l’expression d’une juvénilité intacte et toujours novatrice, et que c’est cette interprétation qui a fini par prévaloir, et non, par exemple, celle de l’historien anarchiste Marcel Oms qui comparait le dernier Renoir au Victor Hugo de L’Art d’être grand-père. Cette stupidité ne prouvait qu’une chose, c’est que Marcel Oms, qui n’était pas stupide pourtant, n’avait pas lu ce recueil extraordinaire dont Aragon a dit qu’il était « l’une des plus hautes gloires de la France ». Mais on ne demande pas à un élu trappiste d’avoir lu Victor Hugo, pas plus que d’avoir vu un film de Jean Renoir.

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