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Dany-Robert Dufour

Éléments n° 183 : le philosophe Dany-Robert Dufour en est convaincu : « Oui, nous allons vers le chaos. »

Antilibéral conséquent et jusqu’à peu classé à gauche, le philosophe Dany-Robert Dufour s’est retrouvé récemment classé par les faiseurs de listes comme un « néo-réactionnaire ». Il aggrave son cas en accordant un entretien à Thomas Hennetier dans le dernier numéro d’Éléments !

ÉLÉMENTS : Voilà de longues années qu’Éléments souhaitait interroger le philosophe Dany-Robert Dufour. En quoi est-il un philosophe important de notre temps ?

THOMAS HENNETIER. Dany-Robert Dufour mène depuis longtemps des travaux très originaux, qui le conduisent, dans une approche pluridisciplinaire, à réfléchir à nouveaux frais aux origines et à la nature profonde du libéralisme. Complémentaire des analyses de Jean-Claude Michéa et d’Alain de Benoist, entre autres, son anthropologie critique du libéralisme ne pouvait que nous intéresser.

ÉLÉMENTS : Pourquoi cette exclamation en couverture d’Éléments : « Oui, nous allons vers le chaos » ?

THOMAS HENNETIER. Précisons que l’entretien a eu lieu alors que le coronavirus n’en était qu’à ses prémisses chinoises ! Il ne s’agit donc pas d’une prédiction en rapport avec la crise sanitaire que nous traversons, mais simplement de la conviction, exprimée par Dany-Robert Dufour, que le capitalisme conduit la planète et l’humanité au chaos, moral, économique, social, environnemental ou tout cela à la fois. Le fait qu’un micro-organisme, considérablement moins grave que d’autres épidémies ayant sévi dans l’histoire du monde, menace aujourd’hui tout l’équilibre économique mondialisé, prouve bien l’extrême fragilité de ce système…

ÉLÉMENTS : Antilibéral conséquent et jusqu’à peu classé à gauche, Dany-Robert Dufour se retrouve désormais classé par les faiseurs de listes comme un « néo-réactionnaire » ? Qu’en est-il ? Peut-on lui souhaiter bienvenue chez les maudits ?

THOMAS HENNETIER. Votre terme est le bon, Dany-Robert Dufour est « conséquent ». En fin analyste du libéralisme, il voit donc bien comment le capitalisme s’est développé à la faveur de toutes les déconstructions, de tous les progressismes, de toutes les injonctions à interdire les interdits et à jouir sans entraves. Comme le rappelle le psychanalyste Jean-Pierre Lebrun, la « condition humaine n’est pas sans conditions », et ces simples rappels au bon sens et à la limite valent aujourd’hui à leurs auteurs les procès en réaction qui reflètent la panique et le vide de la pensée des nouveaux accusateurs publics.

ÉLÉMENTS : Qu’est-ce que le convivialisme, dont il est l’un des porte-parole ?

THOMAS HENNETIER. Le terme de convivialisme n’est pas sans nous rappeler la « convivialité » chère à Ivan Illich. C’est d’ailleurs à l’occasion d’un colloque consacré à l’auteur de La société sans école, qu’Alain Caillé, sociologue fondateur du MAUSS (Mouvement anti-utilitariste dans les sciences sociales) a proposé à des chercheurs du monde entier de travailler sur un fond doctrinal nouveau, chargé de répondre aux crises des sociétés modernes. Naviguant entre deux écueils que sont le catastrophisme et l’irénisme, le convivialisme cherche à donner une forme d’unité aux initiatives alternatives au néolibéralisme, sans négliger la question politique des institutions et des formes de démocratie qui doivent refonder la vie en société.

Photo : © Louis Monier

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