En Bretagne, la presse est dominée par Le Télégramme et Ouest-France, deux journaux représentant la gauche et l’extrême-centre qui ont une ligne éditoriale et un traitement de l’information identiques. Entouré par ces mastodontes (Ouest-France est le premier quotidien français depuis 1975) grassement financés par l’argent public (près de 10 millions d’euros d’aide en 2023), un média indépendant et engagé résiste contre vents et marées. Pressions politiques et médiatiques, censure, répression, le bateau Breizh-Info a tangué plus d’une fois dans un pays où la liberté d’expression est de plus en plus en danger. Dans Breizh-Info, 11 ans de combat médiatique, Yann Vallerie revient sur cette histoire. A l’abordage…
ÉLÉMENTS : Au début des années 2000, Internet offrait un espace privilégié de liberté d’expression ; les promesses que l’Internet libre portait s’éteignent face à la soif de censure de la gauche et de l’extrême-centre. Quelle place a votre média dans le combat informationnel et métapolitique aujourd’hui ?
YANN VALLERIE : Internet était un Eldorado de la liberté, mais il est devenu le Far West des censeurs et des idéologues. Les mastodontes comme Ouest-France et Le Télégramme, main dans la main avec l’État et les GAFA, étouffent toute dissidence. Breizh-Info est une forteresse dans cette bataille métapolitique. Nous brisons les tabous, défendons une information non-alignée et refusons de nous plier aux diktats du politiquement correct. Notre rôle est simple : être le caillou dans la chaussure des bien-pensants, une voix pour ceux que les grands médias méprisent. Quand tout le monde marche au pas, il est essentiel d’être celui qui avance à contre-courant et, s’il le faut, envers et contre tous.
ÉLÉMENTS : Dans votre livre vous retracez le parcours de Breizh-Info au cours de ses onze années d’existence. Son équipe, ses 48 000 articles publiés, les défis permanents, les difficultés et les réussites ; de quoi êtes-vous le plus fier ?
YANN VALLERIE : Ce dont je suis le plus fier, c’est notre capacité d’adaptation et de survie. Dans un paysage médiatique hostile, face à des adversaires surpuissants et subventionnés, nous avons tenu bon. Mais au-delà de la résistance, je suis fier de l’impact que nous avons eu : nous avons mis des sujets sous les projecteurs que tout le monde voulait occulter, qu’il s’agisse des dérives de l’immigration massive, de l’insécurité, ou de la défense de l’identité bretonne. Nous avons obligé y compris le mainstream à mettre le focus sur les ravages de la drogue en Bretagne, ou les mineurs isolés délinquants sévissant en Bretagne. Nous avons participé à la surmédiatisation d’affaires scandaleuses, comme le squat de la maison de Maryvonne Thamin, ou l’affaire des migrants de Callac. Nous avons fourni les informations nécessaires à la mobilisation d’une partie de nos lecteurs sur de nombreux sujets. Breizh-Info est un média de combat, et chaque jour de notre existence est une victoire contre ceux qui voudraient nous voir disparaître.
ÉLÉMENTS : Vous proposez chaque jour des articles en langue bretonne, et une partie de l’introduction de votre livre est écrite en breton. Vous défendez et promouvez ardemment la langue et l’identité bretonnes, une nécessité ?
YANN VALLERIE : Défendre la langue bretonne, c’est défendre l’âme de notre peuple. Ceux qui abandonnent leur langue abandonnent leur mémoire, leur histoire, et leur avenir. La Bretagne est plus qu’un territoire, c’est une nation qui mérite d’être préservée et célébrée. Promouvoir le breton, c’est une obligation morale. Si nous ne le faisons pas, qui le fera ? Les bureaucrates de Bruxelles ? Les dirigeants parisiens ? Soyons sérieux. Chaque mot breton publié sur Breizh-Info est un acte de résistance face à l’uniformisation culturelle.
ÉLÉMENTS : Culture (cinéma, musique, bande dessinée), sport (rugby, cyclisme), économie… vous traitez de sujets éclectiques. Une volonté de ne pas se limiter aux faits divers et aux questions de société ?
YANN VALLERIE : L’éclectisme est une arme. Si nous voulons que Breizh-Info parle à tous les Bretons, il faut aborder ce qui les touche au quotidien. Oui, nous parlons de faits divers et de société, mais notre Bretagne, ce n’est pas que ça. C’est un terreau de créativité, d’exploits sportifs, de réussites économiques. En parlant de tout cela, nous montrons que l’identité bretonne est vivante, qu’elle respire dans chaque domaine. Nous ne voulons pas d’un média qui rumine seulement les mauvaises nouvelles, mais d’un média qui inspire et réveille l’âme bretonne. Et au-delà de l’âme bretonne, nous sommes une rédaction composée d’hommes et de femmes qui ne sont pas « obsédés » par les faits divers et la politique. Ils aiment et pratiquent des sports, vont au musée, au cinéma, lisent, vont au restaurant…comme tout le monde. On a un lectorat qui apprécie le cyclisme, le rugby notamment, donc on essaie de lui proposer des articles originaux sur la question.
ÉLÉMENTS : Quels sont vos projets pour les onze prochaines années ?
YANN VALLERIE : Conquérir. Pas de demi-mesure, pas de compromis. Breizh-Info doit poursuivre sa mission de salut public en Bretagne et au-delà. Nous voulons étendre nos réseaux, renforcer notre offre en breton, multiplier les enquêtes de terrain et les reportages exclusifs. Mais surtout, nous voulons que Breizh-Info reste fidèle à son essence : un média qui dérange, qui provoque, qui informe sans filtre et qui se refuse à toute censure, à tout tabou. Dans un monde où l’information devient un outil de conditionnement, nous continuerons à être cette voix libre qui rappelle que la presse alternative est un phare dans la tempête de l’uniformisation mondiale.
Yann Vallerie, Breizh-Info, 11 ans de combat médiatique, éditions Breizh-Info, 192 p., 19,90€