Dans cette nouvelle dystopie, Alexis Legayet nous plonge dans un monde fort peu lointain où les hommes augmentés biologiquement et technologiquement baguenaudent au cœur d’une société presque totalement « apaisée », dans laquelle l’alimentation carnée a été interdite au profit d’une végétarisme sourcilleux, et où même les prédateurs du monde animal ont été génétiquement débarrassés de leurs fâcheux penchants carnassiers. Le paradis sur terre ? Pas encore, pas tout à fait… Pas pour tout le monde en tout cas, à commencer par les activistes du groupe frugivore « Flower power » qui accusent les « végans » d’être les infâmes tortionnaires et bourreaux des plantes innocentes et luttent pour leur protection et leur libération. Un mouvement que Dan va rejoindre, plus attiré il est vrai par la beauté troublante et les courbes avantageuses d’une des militantes que par la cause végétale à laquelle il va pourtant se consacrer corps et âme – entre sabotage de tronçonneuses de bûcherons et attaques de fleuristes – pour séduire celle qu’il considère déjà comme la femme de sa vie. Un engagement qui va le mener beaucoup plus loin qu’il n’aurait pu l’imaginer, car, pour certains, la disparition de la souffrance végétale n’est qu’une étape infime vers un projet beaucoup plus vaste et ambitieux…
L’ouvrage, qui débute comme une farce grotesque et drolatique, se transforme peu à peu en conte philosophique à l’issue particulièrement terrifiante.
En quelques livres, Alexis Legayet s’est incontestablement imposé comme l’un des maîtres du l’anticipation loufoque mise au service d’une critique sociétale aussi radicale qu’affûtée.
Alexis Legayet, Bienvenue au paradis, Éditions Æthalides, 185 p., 18 €.